L’activité physique pour prévenir et mieux soigner!
Pathologies cardiovasculaires, métaboliques, rhumatismales ou neurologiques, cancers, dépression… l’activité physique contribue à la prévention de nombreuses maladies chroniques. Explications et recommandations pour vous lancer en toute sécurité.
« Depuis le début de la crise sanitaire, des séries de travaux sont venues confirmer que les personnes pratiquant une activité physique régulière sont moins fréquemment infectées par le virus du SARS-CoV-2 que celles qui sont inactives – un écart d’environ 30 %.
Les actifs ont également 2 fois moins de risques de développer une forme grave de Covid nécessitant une hospitalisation, ainsi que 2,5 fois moins de risques d’en mourir. »
Pr Martine Duclos, endocrinologue, médecin du sport et physiologiste, cheffe du service de médecine du sport au CHU de Clermont-Ferrand
L’activité physique, adaptée et encadrée par des professionnels formés à l’exercice, est aussi désormais de plus en plus plébiscitée dans la prise en charge des troubles persistants post-Covid.
Perte de poids, douleurs, fatigue intense, difficultés respiratoires… ces symptômes perdureraient chez près de 25 % des individus plusieurs mois après avoir été testés positifs au virus.
L’étude française Recover-19 ambitionne d’évaluer les apports d’un programme de réentraînement à l’effort mixant endurance et renforcement musculaire (2 à 3 séances hebdomadaires de 20 à 30 minutes, pendant 4 semaines) dans la récupération post-Covid.
« Les résultats, préliminaires, mettent en évidence une augmentation de 5 à 8 % de la capacité physique des patients qui en ont bénéficié, ainsi qu’une diminution de leur niveau de stress d’environ 20 % et qu’une amélioration de la qualité de vie de l’ordre de 30 % »
Pr François Carré, cardiologue et médecin du sport au CHU de Rennes, où a été lancé ce programme
Prochaine étape ? Comparer ces résultats préliminaires avec ceux d’un groupe contrôle, c’est à-dire ne bénéficiant pas d’un tel programme de remise en forme. Si ces bénéfices venaient à être confirmés, ils viendraient s’ajouter à la (longue) liste de maux que le sport vient non seulement prévenir mais également soigner.
L’activité physique et sportive, une thérapie non médicamenteuse reconnue
Des compétitions d’aviron « indoor » pour les femmes atteintes d’un cancer du sein, des Olympiades pour les personnes atteintes de sclérose en plaques, ou encore des salles de sport qui, au plus fort des restrictions durant l’épidémie de Covid-19, maintenaient leurs portes ouvertes pour les personnes souffrant d’une maladie chronique ou d’une affection longue durée… l’activité physique et sportive s’est hissée, au cours des dernières années, en tête des facteurs de santé.
Il faut dire que cette thérapie non médicamenteuse, reconnue comme telle par la Haute Autorité de santé (HAS) depuis 2011, n’en finit plus de démontrer ses bienfaits, non seulement dans la prévention de maladies chroniques, mais également dans leur contrôle, pour limiter les séquelles et améliorer la qualité de vie de ceux qui en sont déjà atteints.
Pour les maladies cardiovasculaires et métaboliques
La pratique d’une activité physique régulière (voir les recommandations de l’OMS) réduit d’environ 35 % les risques d’hypertension artérielle, d’infarctus du myocarde et d’accident vasculaire cérébral, avec une diminution de plus de 30 % de la mortalité chez les cardiaques. En outre, les actifs voient leur risque de développer un diabète de type 2 diminué de près de 40 %.
« L’activité physique est également le premier traitement de l’hypertension modérée, du taux de cholestérol trop élevé ainsi que du diabète de type 2 puisqu’elle participe au contrôle de la glycémie »
Pr Carré
Une étude d’intervention randomisée conduite auprès de sujets prédiabétiques et publiée dans la revue internationale JAMA Internal Medicine confirmait récemment que le recours à une activité physique
accrue, associée à un régime alimentaire équilibré, permettait d’améliorer l’équilibre glycémique des sujets, avec à l’arrivée une réduction du risque d’entrée dans la maladie diabétique de l’ordre de 40 % à 47 % à deux ans.
« Si vous souffrez d’une hypertension et/ou d’un diabète avancé nécessitant le recours à un traitement médicamenteux, l’activité physique régulière participera également à réduire les complications de ces maladies, en particulier celles d’ordre cardiovasculaire. En outre, elle permet souvent de diminuer la prise de certains médicaments ou tout du moins de limiter l’escalade thérapeutique »
Pr Carré
L’activité physique adaptée et régulière fait également partie intégrante de la récupération post-AVC, pour améliorer l’autonomie et la condition physique des patients, mais également afin de diminuer le risque de récidive et la mortalité cardiovasculaire.
Contre le cancer, le sport joue dans toutes les étapes de la maladie
En cancérologie, les études démontrant les bienfaits de l’activité physique se sont multipliées au cours des dix dernières années…
« Elle participe à la fois à diminuer le risque de survenue d’un cancer [d’environ 20 à 25 % pour les cancers du sein, du côlon, de l’utérus, de la vessie et de l’estomac, NDLR], mais elle fait aussi partie intégrante de la prise en charge pendant la maladie, pour diminuer les effets secondaires des traitements. L’activité physique adaptée demeure, à ce titre, le seul traitement dont l’efficacité est reconnue pour lutter contre la fatigue en cancérologie »
Pr Duclos
Enfin, des études révèlent que les femmes souffrant d’un cancer du sein et pratiquant une activité physique adaptée pendant les traitements voient leur risque de mortalité diminuer d’environ 30 % et, si elles continuent après la maladie, leur risque de récidive diminue de 30 à 40 %.
Lombalgies, arthrose et ostéoporose
Les lombalgies, et plus globalement les rhumatismes, ne doivent pas nous conduire à limiter les mouvements.
« Le premier traitement, c’est l’activité physique »
Pr Martine Duclos
En pratique, la mise en mouvement permet de lutter contre l’enraidissement des articulations, de limiter l’inflammation et donc la douleur. On veillera toutefois à pratiquer en dehors des phases de poussées douloureuses aiguës.
« Le sport permet également de ralentir la perte osseuse à mesure que l’on avance en âge . À ce titre, il fait partie intégrante du traitement de l’ostéoporose, avec à l’arrivée une diminution des risques de fracture, en particulier chez les personnes âgées. »
Martine Duclos
Des effets positifs sur la santé mentale également
Si les programmes d’activité physique adaptée améliorent les capacités physiques et fonctionnelles, ils se révèlent également bénéfiques pour les fonctions cognitives. En 2019, sur la base de récents essais randomisés, l’Inserm concluait ainsi que l’activité physique adaptée mixte (c’est-à-dire associant endurance et renforcement musculaire), à raison d’au minimum 3 séances hebdomadaires supervisées, pendant trois mois, demeurait aussi efficace que les médicaments (anxiolytiques, antidépresseurs) pour traiter le stress, l’anxiété et la dépression légère à modérée.
« En outre, un tel programme sportif va contribuer à prévenir les récidives », souligne le Pr Carré, qui recommande également, pour les sujets atteints d’épisodes dépressifs chroniques d’intensité modérée à sévère, d’associer un programme d’activité physique aux autres thérapeutiques médicamenteuses et/ ou psychothérapeutiques prescrites.
Enfin, de plus en plus de travaux mettent en évidence l’intérêt de tels programmes pour ralentir l’évolution des maladies neurodégénératives (Parkinson, Alzheimer et maladies apparentées), avec à la clé une amélioration de la mobilité, le maintien d’une plus grande autonomie ainsi que d’une meilleure qualité de vie pour les patients. D’après les études et méta-analyses disponibles sur le sujet, une trentaine de maladies chroniques pourraient à la fois être prévenues et contrôlées ou soulagées par la pratique d’une activité physique régulière.
« Dans une expertise de l’Inserm à laquelle je participais en 2019, nous avions conclu, avec l’ensemble des experts participants, que ne pas prescrire d’activité physique en cas de pathologie chronique était une perte de chances pour le malade »
Pr Carré
En pratique, si vous êtes fragilisé par l’âge, une maladie ou un handicap, parlez-en à votre médecin généraliste, qui pourra vous orienter vers des structures proposant des programmes d’activité dite adaptée, c’est-à-dire ajustée à votre condition physique et vos capacités fonctionnelles.
En chiffres
- La pratique d’une activité physique régulière est associée à une réduction de la mortalité précoce, entre 29 et 41%
- 1 adulte sur 4 n’atteint pas le niveau d’activité physique recommandé par l’OMS.
- 4 adolescents sur 5 ne pratiquent pas une activité physique aux niveaux recommandés. Les enfants de 5 à 17 ans devraient en effet accumuler au moins 60 minutes par jour d’activité physique d’intensité modérée à soutenue, auxquelles il faudrait ajouter 3 séances hebdomadaires visant à renforcer les muscles et les os.
« Tous les sports, ou presque, peuvent être pratiqués »
Il y a dix ans, vous lanciez le concept de « sport santé sur ordonnance » à Strasbourg. Depuis 2017, cette initiative a été déployée au niveau national… Qui peut en bénéficier?
« Toute personne porteuse d’une pathologie! Au total, l’Assurance maladie recense une trentaine d’affections pour lesquelles le médecin traitant peut vous prescrire une activité physique adaptée. Suivra un entretien individuel avec un intervenant spécialisé en activité physique adaptée dans une structure dédiée proche de chez vous (maison Sport Santé, association sportive, club omnisports…) et qui sera complété par des tests d’évaluation de votre condition physique. L’objectif, construire ensemble votre projet personnalisé. »
Quels sont les sports les plus souvent prescrits?
« Il s’agit des activités natatoires (marche dans l’eau, aquagym, parcours aquatonic, aqua-marche, aqua-jogging…) et à vélo, fixe ou de déplacement. La marche dite nordique, c’est-à-dire avec les bâtons, est également plébiscitée. Mais tous les sports, ou presque, peuvent être pratiqués, à condition d’en adapter l’intensité, les règles ou le matériel. Nous venons par exemple de lancer un « foot santé » avec le Racing Club de Strasbourg… De même, certaines structures proposent du « tennis santé » ou du « basket santé » à leurs adhérents. Quelle que soit l’activité, elle sera toujours encadrée par un éducateur sportif spécifiquement formé au sport santé.»
Le sport sur ordonnance » est-il facilement accessible en Île-de-France?
« Oui, des initiatives fonctionnent à Paris, Saint-Quentin-en-Yvelines, Charenton-le-Pont, et beaucoup de maisons Sport Santé sont actives dans la région.»
Dr Alexandre Feltz, titulaire de la chaire « Compétences et vulnérabilités » de l’université des Patients-Sorbonne médecin généraliste et adjoint au maire à la santé de la ville de Strasbourg, pionnier du sport santé sur ordonnance, auteur de Sport santé sur ordonnance, manifeste pour le mouvement, aux éditions des Équateurs
En savoir plus
- La plateforme Prescri’forme recense les différents lieux, en Île-de-France, où la pratique du sport sur ordonnance est possible