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Un cerveau en pleine santé, à tout âge !

Nos conseils pour prendre soin de son cerveau, « haut siège » des fonctions cognitives, de la mémoire et des émotions.

Le "capital-cerveau"

Professeur de santé publique au CHU de Lille et directeur de la Fondation Alzheimer, Philippe Amouyel aime àparler de « capital-cerveau ». L’équivalent d’un capital retraite que l’on veillerait à constituer, entretenir et faire fructifier tout au long de la vie, et qui à terme, permettrait de mieux résister aux agressions extérieures, aux effets de la vieillesse, à certaines pathologies telles que la maladie d’Alzheimer ou la dépression…

En outre, ce capital-cerveau favoriserait chez chacun d’entre nous de meilleures capacités de concentration et d’attention.

Prévenir le vieillissement cognitif, c’est possible

Première étape : pour stimuler et entraîner votre cerveau, faites-le sortir de sa zone de confort.

« C’est en effet durant l’apprentissage de nouvelles tâches et connaissances que vous établirez de nouvelles connexions entre vos neurones. Et ce que l’on sait, c’est que plus ces connexions seront nombreuses et solides, plus votre capital-cerveau augmentera ».

– Le Pr Amouyel

  • Lisez, chaque jour.
  • Faites l’apprentissage d’une nouvelle langue, ou d’un nouvel instrument de musique.
  • Prêtez-vous, sans modération, à ces quatre activités dont on a démontré qu’elles stimulaient puissamment le cerveau : le jardinage, le bricolage, les voyages et le tricot.
  • Préférez les mots croisés au sudoku, qui entraînent davantage le cerveau dans sa globalité.
  • Devenez ambidextre ! Si vous êtes droitier, utilisez votre main gauche chaque jour durant une dizaine de minutes, et vice-versa.
  • « Soyez curieux, optimiste et ayez une vie sociale riche », conseille le Pr Amouyel. « On sait en effet que le développement cérébral de l’enfant, comme de l’adulte, se fait au travers de la richesse des relations sociales… À ce titre, la bonne humeur et la vie en société sont deux alliés majeurs du cerveau, et qui participent pour beaucoup au maintien des capacités cognitives lorsqu’on avance en âge. On constate notamment que les personnes vivant en couple font moins d’Alzheimer que celles vivant seules… Une protection dont bénéficient également les personnes optimistes. » En cette période de crise sanitaire marquée par des restrictions de rassemblements, le médecin souligne particulièrement l’importance du recours aux nouvelles technologies pour « garder le lien ».

La santé du cerveau dépend aussi de l’hygiène de vie.

La deuxième étape consiste à choyer son cerveau ! Pour ce faire, on veille tout d’abord à suffisamment dormir, entre 7 et 9h par nuit, selon ses besoins… Une bonne nuit de sommeil est non seulement bénéfique aux processus de mémorisation et d’apprentissage, mais c’est également, pour notre cerveau, le moment propice à l’élimination d’un certain nombre de déchets toxiques accumulés durant la journée.

« Les premières concernées par ce “nettoyage nocturne” rendu possible grâce à une filtration accrue du liquide céphalo-rachidien, ce sont les protéines bêta-amyloïdes dont on sait aujourd’hui que leur accumulation dans le cerveau est directement impliquée dans la formation de la maladie d’Alzheimer ».

– Le Pr Amouyel.

Autres recommandations : adopter une alimentation faisant la part belle aux oméga-3 comme le régime méditerranéen (voir interview du Dr Jean-Marie Bourre, plus bas) et bouger, encore plus ! En effet, selon une récente analyse conduite auprès de 163.797 individus, la pratique d’une activité physique régulière serait associée à une réduction du risque de déclin des fonctions cognitives et de survenue d’Alzheimer, de l’ordre de 45% chez ceux qui pratiquent au minimum deux fois par semaine.

En outre, les études s’accumulent quant aux bénéfices de l’exercice physique dans la prévention de la dépression, et ce dans tous les groupes d’âge. En pratique, le Pr Amouyel conseille de se munir d’un podomètre afin de calculer le nombre de pas que l’on effectue à l’échelle de sept jours, semaine et week-end compris. Divisez le résultat obtenu par sept, et vous obtiendrez votre moyenne de pas à la journée. « Ensuite, fixez-vous des objectifs de progression… Il peut s’agir par exemple d’augmenter son nombre de pas de 10 % la semaine suivante, ou d’accélérer son rythme de marche », poursuit le médecin.

Dansez !

Plusieurs expériences ont mis en évidence une augmentation du volume de l’hippocampe – zone de l’élaboration de la mémoire à long terme – chez les personnes suivant des cours de danse, en comparaison avec la pratique d’autres activités physiques de même intensité et de même durée.

Valse, salsa, tango, zumba, rock, country, cha-cha-cha… En pratique, suivez des cours, variez les rythmes et les partenaires.

Le cerveau, « un organe fragile »

« Le cerveau est un organe fragile que l’on doit veiller à protéger quotidiennement ».

– Le Pr Amouyel

Le premier risque, ce sont les agressions extérieures : les chocs et autres traumatismes répétés, même légers, sur la tête qui peuvent mettre à mal le cerveau et la réserve cognitive qu’il héberge. « On s’est notamment aperçu que les joueurs de football américain développaient jusqu’à trois fois plus d’Alzheimer que le reste de la population », poursuit le médecin, qui souligne l’importance de porter un casque à vélo, ou lorsqu’on pratique un sport à impact ou de combat.

Haro également sur le tabac, l’alcool et autres drogues… Autant de substances qui se révèlent toxiques pour nos neurones.

Prudence également avec les somnifères à durée d’action prolongée, « ils seraient associés à une diminution de nos réserves cognitives », met en garde le Pr Amouyel. Si vous prenez ce type de médicaments, en particulier depuis plus de douze semaines en continu, prenez rendez-vous avec votre médecin traitant afin d’en discuter avec lui.

Enfin, sachez que bon nombre de pathologies concourent à majorer le risque de survenue d’Alzheimer : les maladies cardiovasculaires principalement, mais aussi les apnées du sommeil ou encore la presbyacousie. Heureusement, une prise en charge adaptée et suffisamment précoce permet de retrouver un risque d’Alzheimer similaire au reste de la population en bonne santé. Bilan auditif, mesure de la tension artérielle, du tour de taille, de la glycémie à jeun, dosage du cholestérol… pensez-y, en particulier après 45 ans, ou plus tôt en cas d’antécédents personnels ou familiaux.

Les trous de mémoire, pas synonymes de maladie neurodégénérative

On égare ses lunettes, oublie un nom propre ou le numéro de la rangée du parking où l’on a garé sa voiture… Des oublis et autres « trous de mémoire » fréquents, d’autant plus lorsqu’on avance en âge, mais qui relèvent davantage d’un manque d’attention, ou d’un surmenage, que d’une maladie de type Alzheimer… Rassurons-nous !

« Les oublis, il faut s’en inquiéter lorsqu’ils entraînent une gêne sociale, pour soi-même ou pour ses proches, comme l’oubli d’une action que l’on vient d’effectuer, ou l’impossibilité de réaliser une tâche habituelle, par exemple se servir de son four à micro-ondes », explique ainsi le Pr Amouyel. Alors, il est conseillé de consulter son médecin traitant, lequel pourra si nécessaire vous orienter vers un centre spécialisé.

« Notre alimentation occidentale ne couvre que la moitié de nos besoins en oméga-3 »

Vous avez consacré une grande partie de votre carrière à l’étude des effets des oméga-3 sur le cerveau. En quoi ces acides gras sont-ils essentiels à notre santé cognitive ?

« Le cerveau est l’organe le plus gras du corps humain, juste après le tissu adipeux… Comprenez qu’à ce titre les acides gras – les oméga-3 au premier chef, qui sont des constituants des membranes des neurones – sont essentiels au bon développement des structures du cerveau durant les premières années de vie… Puis tout au long de la vie, pour assurer son bon renouvellement. Or ces acides gras sont dits essentiels, c’est-à-dire que le corps humain ne peut les fabriquer par lui-même, et que l’on doit donc impérativement les trouver dans l’alimentation. »

Qu’en est-il justement de notre consommation d’oméga-3 ?

« Elle est insuffisante… On ne consommerait en effet que la moitié de nos besoins en oméga-3. Pour combler ces déficits, il est essentiel de consommer 2 à 3 portions de poisson par semaine, en particulier les espèces « grasses » que sont le maquereau, la sardine, le hareng, le saumon et la truite… En outre, il est recommandé de substituer l’une des deux cuillérées à soupe d’huile végétale que l’on consomme quotidiennement par une d’huile de colza. »

Quels bénéfices peut-on en attendre ?

« On sait aujourd’hui que l’adoption d’un régime riche en oméga-3, tel que le régime méditerranéen, peut réduire de près de 50 % le risque de maladie d’Alzheimer. De plus, l’incidence des oméga-3 a été très largement étudiée en psychiatrie, particulièrement dans la prévention des épisodes dépressifs. »

– Interview du Dr Jean-Marie Bourre. Membre de l’Académie de médecine, il a dirigé des unités de recherche de l’Inserm spécialisées dans la chimie du cerveau et ses rapports à la nutrition.

En chiffres

200.000 nouveaux cas d’Alzheimer sont diagnostiqués chaque année en France.

75 ans : c’est l’âge moyen de survenue des premiers symptômes de la maladie d’Alzheimer.

2 malades d’Alzheimer sur 3 sont des femmes.

À Lire
  • Le Guide anti-Alzheimer. Les secrets d’un cerveau en pleine forme, de Philippe Amouyel, éditions Le Cherche-Midi.
  • Le programme pour bien nourrir votre cerveau, du Dr Jean-Marie Bourre, éditions Odile Jacob.